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Je garantis, sans présomption, que
cette
formation
singulière
a
obtenu
l'assentiment de tous ceux qui ont eu la
modestie de considérer que leur parole était
imparfaite et sont venus chercher auprès de
moi, qui n'ai pas seulement théorisé
l'expression mais l'ai pratiquée, de quoi
améliorer leur discours en même temps que
leur personnalité.
LE M@G DES AVOCATS
: Le projet de loi sur le
renseignement agite les citoyens et leurs
défenseurs, les avocats : voulez-vous nous
faire part de votre analyse personnelle ?
Philippe BILGER
: J'ai défendu le projet de loi
sur le Renseignement. Sans être béat. Il y a
évidemment des notions et des concepts à
préciser mais là n'est pas l'essentiel.
J'aurais d'abord mauvaise grâce à
récuser la démarche d'un pouvoir socialiste
enfin prêt à tirer toutes les conséquences
d'événements tragiques causés par le
terrorisme et je ne serais pas hostile à ce que
la criminalité et la délinquance dites ordinaires
puissent enfin bénéficier de cette lucidité.
Ensuite je récuse cette perverse
habitude française qui malgré un consensus
dominant sur l'utilité d'un projet s'acharne
pourtant à n'en déceler que les futures et
purement virtuelles conséquences négatives.
Enfin, alors qu'auparavant l'efficacité
des services de renseignement usait de
méthodes condamnées à demeurer occultes,
avec ce projet de loi ce qui est nécessaire pour
l'efficience de notre sauvegarde à tous va
devenir légal. C'est un immense progrès.
Il va de soi que mon adhésion sera
d'autant plus validée que la loi sera appliquée
d'une manière stricte et rigoureuse et que
ceux qui viendraient à faillir dans son
exécution, par paresse, négligence ou
perversion, seront sévèrement sanctionnés.
Pour conclure, si un arbitrage est à
opérer entre liberté et sécurité et comme une
balance égale est impossible, je n'ai pas de
honte à me dire prêt à sacrifier un peu de ma
liberté pour la sûreté de tous.
LE M@G DES AVOCATS
: Pendant plus de 20
ans, vous avez été Avocat général à la Cour
d'assises de PARIS : quels conseils donneriez-
vous à un jeune avocat soucieux de devenir un
bon pénaliste ?
Philippe BILGER
: Le conseil à donner à un
jeune avocat voulant devenir un bon pénaliste
? Modestie de l'être, orgueil de la fonction et
de la mission. En ayant conscience que
l'étiquette ne fait l'avocat mais que celui-ci a à
prouver
quotidiennement
qu'il
l'est.
Intelligence du procès, finesse des analyses,
urbanité judiciaire, profondeur du fond et
courtoisie de la forme, culture générale,
humanité. Un bon pénaliste, ce sera d'abord
une personnalité dont la morale sera
exemplaire et qui en se levant pour plaider
appellera une certaine qualité de silence.
Comme si sa parole était attendue.
Ce sera long, ce sera difficile. Ce qui
compte, faute d'atteindre l'idéal, c'est la
tension bienheureuse, stimulante, parfois
miraculeuse qui l'en rapprochera…
Jacqueline Socquet-Clerc Lafont